Mercenaire. Jamais Jordana n’aurait pensée faire ce boulot un jour. Et pourtant. Tijuana semble l’avoir entièrement métamorphosée. Du moins, en surface. En y réfléchissant bien, cette situation n’est pas déplaisante. Il lui arrive de prendre un certain plaisir dans ce qu’elle fait. Étrange non ? Difficile à comprendre plutôt. Quoi qu'il en soit, une nouvelle tête venait de tomber. Une jeune femme qu'un chef de gang voulait voir si pieds sous terre. Comment refuser une telle opportunité ? Il lui fallait simplement la trouver. Une balle entre les deux yeux et l'affaire serait rapidement classée. La journée n'était pas mauvaise, le ciel était bleu, sans un nuage. Une très belle journée. Au Nord, il y aurait certainement eu piscine, boissons ou même sieste. Une petite vie tranquille, routinière et parfaitement ordonnée, comme la plupart des familles. Cela ne lui manquait pourtant pas. La jeune femme avait toujours rêvée de bouger, d'avoir une vie mouvementée, un quotidien palpitant. À ce niveau-là elle était servie. Et puis, plus rien ne l’intéressait là-bas. Elle n’avait plus rien. Alors au lieu de se plaindre, de prier ou de se lamenter sur son sort, elle préférait accepter et vivre, ou plutôt survivre à Tijuana. La seule chose qui pourrait l’irriter ? Les postes de contrôles. Les éviter n’est pas vraiment un problème, mais c’est toujours barbant de devoir se cacher, se dissimuler dans les égouts pour passer d’une communauté à l’autre. Les frontières. Il fallait une autorisation pour aller d’Est en Ouest, du Nord au Sud. Quelle connerie. Une fois sur place, Jordana n’attendit pas longtemps. Entre les deux terres, elle pouvait apercevoir une chevelure claire, châtain. Cette description. Son contrat. Une jeune femme plutôt menue, seule… ce qui n’est pas prudent ici. Pourtant, en la regardant, la mercenaire sentait que quelque chose clochée. Elle n’était pas… elle ne semblait pas normale. Comment l’expliquer ? Elle ne le savait pas mais sa tête lui disait que ce n’était pas elle. Elle lui ressemblait pourtant. Les postes de contrôles étaient à plusieurs mètres devant elles. Elles étaient pratiquement seules. L’exécution aurait pu être parfaite…

Jordana sortit son arme. Un Desert Eagle 357. Arme automatique, canon polygonal, plutôt pratique. Son seul objet dit fétiche. Bref. La jeune femme s’approcha de sa cible. Dix mètres, puis cinq… puis deux. Elle était de dos. S’il y a bien une chose que Jordana refuse c’est bien de tirer dans le dos d’une personne. Cela pouvait être dangereux mais en attendant, c’était lâche et déloyal. Son doigt arma son pistolet. Elle la tenait en joug. Le bruit que produisit l'arme fit se retourner sa cible. Et c'est à ce moment-là que Jordana compris. Elles étaient face à face et pourtant, cette jeune femme ne l'a regardé pas. Ses yeux. Une aveugle. Son bras se baissa peu à peu. Pourquoi voudrait-on éliminer une aveugle ? Elle ne semblait ni dangereuse, ni même ‘utile’ pour ce gang. Intriguée, Jordana se ressaisit et releva d’un geste brusque son bras. À quelques centimètres de la tête de la jeune aveugle.

« Veronica Farros ? »

Cela semblait tellement faux. Même Jordana n’y croyait pas. Pourtant elle avait toujours son flingue pointé dans sa direction. Ça sent pas bon Jo’.